Éditorial

Passion et résilience

17 novembre 2016
Rédaction: Gaëlle Bodin

Quand un enfant apprend à marcher, cela ne se fait pas du jour au lendemain, cela prend plusieurs semaines et parfois plusieurs mois. C’est un processus en plusieurs étapes, où chaque essai l’emmène un peu plus loin, le propulse un peu plus vite avec toujours plus d’autonomie.

Bien sûr il y a la peur, les hésitations, il y a les chutes plus ou moins douloureuses. Et pourtant, chaque fois, le désir d’y arriver est plus fort et il se relève malgré la douleur et le doute. Avec persévérance et sous les encouragements et les compliments de ses parents, il y arrive enfin et la fierté éclaire son visage de mille feux.

Dans le monde professionnel, c’est la même chose, à la sortie de l’école, on effectue ses premiers pas dans un monde inconnu. Et parfois aussi, c’est la chute! On ne la voit pas venir, on pense gérer le déséquilibre mais le fil s’aminci et on a beau fermer les yeux, l’étourdissement nous pousse dans le vide. Parfois, on continue d’essayer en pensant que tout ira mieux dans un jour, dans une semaine ou dans un mois. Mais rien ne va plus! Il faut alors savoir s’arrêter, accepter et respecter cet arrêt obligatoire et réfléchir pour pouvoir se relever!

Une fois de nouveau debout, il faut avancer sans regarder en arrière, accepter les émotions contradictoires qui nous habitent et en faire notre force. On retrouvera alors notre confiance et notre fierté. Il ne faut pas avoir honte d’être tombé, cela fait partie de nous et de notre parcours. On se relève plus fort en ayant compris que parfois, il faut faire les choses différemment.

Cet enfant qui tombe et se relève, c’est moi.

Très jeune, je faisais de grands discours de justice et d’égalité à mes parents, je voulais être juge pour enfants et incarner cette personne qui permettrait à tous les enfants d’avoir les mêmes chances dans la vie. Mon parcours scolaire a été sculpté en fonction de cet objectif, tous mes choix étaient teintés par cette ambition.

Je me suis impliquée au niveau syndical et politique pour encore et toujours défendre et revendiquer cette justice et cette égalité. Ces années parisiennes ont forgé mon caractère, j’en ai gardé de nombreux amis et j’ai acquis une personnalité propre!

Ma maîtrise de droit privé en poche j’ai toutefois eu des doutes, saurais-je être à la hauteur de ces ambitions! C’était inconscient, je ne l’ai réalisé que bien des années plus tard alors qu’on m’interrogeait souvent sur mon départ de la France. Je ne saurais toujours pas aujourd’hui dire pourquoi mais j’avais décidé d’accepter l’invitation d’amis montréalais à venir découvrir leur ville, en hiver au surplus!

Est-ce ce tempérament passionné qui m’a fait décider de faire ma nouvelle vie ici après seulement quelques mois? Probablement! Il me fallait tout rebâtir : j’ai relevé mes manches et j’ai foncé tête première, j’avais cette ambition de réussir cette autre chose dont j’ignorais encore la forme et le nom.

Cependant, après quelques années en pratique privée comme avocate, la naissance de 3 enfants et presque 10 ans en édition juridique, j’étais à bout de souffle et au bord du gouffre. La chute a été aussi inattendue que brutale et douloureuse. Se relever s’annonçait comme un défi insurmontable. J’avais appris à marcher, courir, sauter, tourner, plonger avec certitude et confiance, je devais tout réapprendre et faire à nouveaux mes premiers pas.

Quand Jannick m’a proposé en juillet 2015 de créer avec elle Profession’ELLE, j’ai dit oui tout de suite, je n’ai pas hésité. C’était l’occasion que j’attendais pour me réinventer et rebondir mais à mon rythme. Je ne la remercierai jamais assez.

Le sujet m’a interpellé alors qu’elle avait à peine terminer sa première phrase. Elle a partagé sa vision, ses ambitions et son idée est devenue la mienne. Nous en avons discuté pendant des heures, il fallait tout penser et tout créer. Chaque détail devait être réfléchi et inventé. J’ai retrouvé ma confiance et cette passion entourant la création d’un projet professionnel.

Plus d’une année après cette rencontre, le site existe, il est en ligne et cette aventure me ravie chaque jour davantage. Quel sentiment d’accomplissement, quelle fierté j’ai ressenti lors de la mise en ligne. Notre travail acharné des derniers mois était récompensé! Bien sûr, il y a eu des doutes et des difficultés mais je suis persuadée que cela nous a rendues plus fortes.

Je prends conscience à chaque instant que ce projet correspond parfaitement à ce qui m’a guidé toute ma vie : des valeurs de justice et d’égalité, une passion de créer, d’aller de l’avant, de faire différemment et une volonté de rendre le monde meilleur, un pas à la fois!